Que ce soit en sport ou dans le milieu professionnel, entrepreneurial ou artistique, ton aptitude à réguler tes émotions a un impact puissant sur ta capacité à performer à ton plein potentiel.
Pour offrir une prestation constante et optimale sous la pression, il faut savoir accéder à un état de calme alerte. Pour illustrer cet état d’esprit, j’aime utiliser cette citation de Miyamoto Musashi, que l’on peut retrouver dans The Book of Five Rings :
« Tant dans les combats que dans la vie de tous les jours, vous devez être à la fois déterminé et calme. Faites face à la situation sans peur mais sans témérité, avec un esprit résolu mais impartial. Même lorsque votre esprit est calme, ne laissez pas votre corps se détendre, et lorsque votre corps est détendu, ne laissez pas votre esprit se relâcher. Ne laissez pas votre esprit être influencé par votre corps ou votre corps être influencé par votre esprit. Ne soyez ni insuffisamment fougueux ni trop fougueux. »
Dans cet article, je te propose trois stratégies pour faire face aux émotions inconfortables qui surviennent dans les moments critiques.
Stratégie 1- Augmenter ton niveau de tolérance à la frustration et à l’inconfort
Albert Ellis, psychologue américain ayant développé la thérapie rationnelle-émotive, a identifié 10 croyances irrationnelles (ou auto-destructrices) qui sous-tendent les émotions et les comportements qui nous éloignent du bonheur. Ce sont des règles que l’on suit consciemment ou inconsciemment, et qui déterminent nos manières d’agir et de réagir.
Par exemple, si tu entretiens la croyance suivante :
Pour me sentir valorisé(e) et heureux(se), je dois réussir dans tout ce que j’entreprends et ne pas commettre d’erreur.
Adopter cette croyance pourrait t’amener à te critiquer ou à te dévaloriser lorsque tu n’arrives pas à performer comme tu le souhaiterais.
Or, bien que nous n’en soyons pas toujours pleinement conscients, nous avons un super pouvoir : nous sommes libres de choisir notre perspective sur les événements. Et il est d’autant plus important de le faire que notre perspective est influencée par nos croyances, et elle impacte nos émotions ; certaines manières d’interpréter les événements et les situations peuvent être utiles à la performance, alors que d’autres peuvent nous ralentir dans l’atteinte de nos objectifs.
Au fil des ans, tu as peut-être appris que la pensée positive était importante pour t’aider à performer. Or, dans un moment de grand stress, il est possible que tu aies tenté d’avoir des pensées positives, sans ressentir ou observer d’effet tangible.
Pourquoi?
Pour que la pensée positive deviennent efficace, il est important de prendre d’abord conscience de nos croyances irrationnelles pour s’en libérer. Si je répète plusieurs fois par jour des pensées positives, mais que mon cerveau n’y croit pas car il s’est imprégné de croyances contradictoires, il devient difficile d’intégrer pleinement cette pensée et d’en récolter les effets!
Une croyance est irrationnelle lorsqu’elle déforme la réalité ou lorsqu’elle nous amène à porter un jugement illogique sur nous-mêmes, sur les gens qui nous entourent ou sur les événements.
L’une des croyances irrationnelles très répandues d’Ellis concerne le niveau de tolérance à la frustration :
Les événements doivent se dérouler comme je le souhaite, sinon la vie sera intolérable.
Voici quelques exemples de cette croyance en action :
Cette personne n’aurait jamais dû me répondre de cette façon, c’est inadmissible.
La direction aurait dû me faire confiance et approuver mon projet, leur attitude est extrêmement frustrante.
Nous avons tous une idée plus ou moins précise de comment certains événements devraient se dérouler, ou de la manière dont certaines personnes devraient agir ou réagir dans une situation donnée. Un problème surgit lorsque nous croyons que ce que nous voulons doit se produire absolument… et à notre façon! C’est là que la frustration survient. En fonction de notre niveau de tolérance émotionnelle, la frustration peut alors avoir un impact important sur notre performance.
Si tu as tendance à ressentir beaucoup de colère ou d’impatience quand les choses ne se passent pas comme tu le voudrais, alors augmenter ton niveau de tolérance à la frustration pourrait t’aider à conserver ton sang-froid et à performer de manière plus optimale et constante.
La faible tolérance à la frustration
Ton niveau de tolérance à la frustration réfère à ta capacité à conserver ton sang-froid et à t’adapter dans les situations stressantes. Lorsque ton niveau de tolérance à la frustration et à l’inconfort est faible, tu as tendance à tenter par tous les moyens de changer la situation, et tu fais une fixation sur le problème et ce que tu veux. Il devient alors difficile de lâcher prise ; c’est alors que tu deviens moins concentré(e), efficace et performant(e) dans ton activité.
Ton niveau de tolérance à la frustration s’élève lorsque tu acceptes ce qui se trouve devant toi. Tes croyances deviennent alors plus rationnelles, non exagérées et plus cohérentes avec la réalité.
Accepter la frustration signifie que tu reconnais qu’il n’y a aucune loi dans l’univers qui dit que cette situation ne devrait pas se produire… même si c’est ce que tu souhaites! Tu t’attends à éprouver des émotions inconfortables à certains moments, mais tu n’amplifies pas ces émotions en te disant qu’elles sont insupportables, et en revisitant mentalement plusieurs fois la situation.
Augmenter ton niveau de tolérance émotionnelle
Une faible tolérance à la frustration est liée à une faible tolérance à l’inconfort. Être frustré(e) et insatisfait(e) te rend inconfortable, et l’inconfort est une source de frustration.
Pour augmenter ton niveau de tolérance émotionnelle, tu peux t’exposer volontairement à des situations inconfortables. En sport, les athlètes et entraîneurs savent à quel point il est important de sortir de la zone de confort! Plonger dans l’inconfort nous permet d’améliorer notre capacité à performer de manière optimale quel que soit l’obstacle qui se présente à nous, car nous apprenons à faire face, tolérer et composer avec les émotions moins agréables telles que la colère, la frustration, l’anxiété, l’embarras, la tristesse ou la déception.
Une autre façon de développer la tolérance émotionnelle consiste à désactiver les croyances irrationnelles en rendant la situation rationnelle. Pour y arriver, nous pouvons apprendre à percevoir les choses comme elles sont, sans déformer la réalité, puis à se questionner pour déterminer si cela est réellement intolérable.
Par exemple, voici comment nous pourrions reformuler les affirmations précédentes :
Je veux que les gens pensent du bien de moi et il est possible qu’ils me jugent lorsque je commets une erreur, mais cela va passer et je sais que personne n’est parfait.
Je n’aime pas quand on me répond de cette façon, mais je peux comprendre que chacun est différent. Je peux apprendre à exprimer calmement mon ressenti.
Je suis frustré(e) que l’on n’ait pas reconnu la pertinence de mon projet, mais conserver mon sang-froid est le meilleur moyen de revoir mes arguments et tenter une nouvelle approche.
Stratégie 2- Qu’est-ce qui te stimule : la peur ou le désir de te dépasser?
Une autre façon de réguler nos émotions de manière efficace est de développer un état d’esprit axé sur la recherche de dépassement de soi, et non sur l’évitement de l’échec.
As-tu déjà remarqué que tu performes le plus souvent à ton plein potentiel lorsque tu as peu d’attentes et que tu n’as rien à perdre? Lorsque le succès est trop important pour nous et qu’on ne pense qu’à cela, il devient beaucoup plus difficile de gérer l’échec. C’est alors que nous essayons de l’éviter à tout prix.
Dans une situation de performance, chacune de nos actions et de nos décisions est motivée soit par la peur d’échouer (vouloir éviter une source de souffrance) ou par le désir de se dépasser (vouloir ressentir du plaisir ou de la satisfaction). Ce sont deux moteurs de motivation très puissants, qui peuvent produire tous deux le même résultat et nous conduire à l’excellence ; cependant, le cheminement motivé par la peur s’avère souvent plus douloureux, car la joie et le plaisir sont moins présents tout au long du processus.
Pour découvrir lequel des deux moteurs de motivation est le plus présent dans ton expérience, je t’invite à te poser la question suivante :
Qu’est-ce qui me motive le plus à produire des efforts?
- Le désir de réussir, d’accomplir et de progresser…
- Ou la peur de commettre des erreurs, de ne pas être prêt(e) à temps ou d’échouer?
Par exemple, certaines personnes ont tendance à se sur-préparer avant une présentation, ou à passer des heures à perfectionner leur travail ; ces attitudes peuvent être motivées par le désir d’éviter la souffrance qui pourrait être causée par l’erreur, l’échec ou l’embarras.
Lorsque le désir de réussir provient de la joie et de la satisfaction ressenties lorsque nous dépassons nos limites et que nous cheminons vers l’excellence, nous nous concentrons alors davantage sur le processus, le voyage et le plaisir de vivre l’expérience, et moins sur le résultat. Nous dirigeons ton attention vers les solutions au lieu des problèmes. L’échec n’affecte pas notre confiance, car nous percevons l’obstacle comme une opportunité de grandir, un pas de plus vers l’objectif et de devenir individu plus fort et plus performant. Puisque l’échec est moins vécu comme une souffrance, il devient plus facile pour nous de sortir de la zone de confort et d’oser prendre des risques.
Voici une vidéo dans laquelle je t’offre donne 3 trucs pour vaincre la peur de l’échec :
Stratégie 3- Utiliser l’effet de filtre
Une troisième stratégie pour gérer les émotions en situation de performance est d’utiliser l’effet de filtre. Un filtre est une nouvelle interprétation de ta réalité, une image différente que tu superposes à ce qui se passe autour de toi. Pour créer l’effet de filtre, tu peux t’entraîner à visualiser avec les yeux ouverts. Lorsqu’une situation te déconcentre ou te fait vivre des émotions inconfortables, imagine une situation différente, où tout se déroule comme tu le voudrais.
Par exemple, si tu fais face à un problème et que tu te sens envahi(e) par le stress ou l’inquiétude, pendant un moment visualise à nouveau la séquence comme si l’erreur ne s’était pas produite. Recrée les émotions reliées à la situation modifiée et sens ton corps se détendre. Ton filtre te permet de lâcher prise, et à cesser de combattre une situation qui ne peut pas être changée, en agissant comme si tout se passait comme prévu. Par conséquent, il t’aide à te calmer et à reprendre le contrôle. Faire comme si ne suffit pas ; le filtre aura un effet beaucoup plus puissant car il inclut les émotions ressenties.
La constance est la clé
Faire face aux émotions est l’un des aspects les plus difficiles de la performance. John Wooden, légendaire entraîneur de la NCAA, disait :
Discernement, bon sens et raison, tout cela disparaît lorsque les émotions enfoncent la porte.
Je t’invite donc à persévérer dans ta pratique, car augmenter ton niveau de tolérance à la frustration et focaliser sur le dépassement de soi et non la peur d’échouer te permettront de développer ta maîtrise et de performer dans le bien-être et l’équilibre.
À bientôt,
Guylaine